jeudi 18 août 2016

Mazie Sainte Patronne des Fauchés et des Assoiffés. Jeni Attenberg. Coup de coeur, coup de foudre





















" Ce n'est pas difficile d'aider les gens. C'est le reste qui pose problème. Tout ce qui reste à vivre dans la journée."
"Nadine, la reine des scénarios invresemblables" travaille sur un documentaire consacrée à Mazie-Phillips Gordon. L'idée lui est venue lorsqu'un ami partage avec elle la découverte d'un journal intime qu'il avait trouvé abandonné sur les terrains des anciens chantiers navals de Navy Yard. 
Ce journal qui avait traversé le siècle, puisque la première page  portait la date de 1er novembre 1907, avait appartenu à Mazie, une femme dont l'histoire est époustouflante.
Ainsi, Nadine part à la recherche de toutes les personnes susceptibles d'avoir rencontré Mazie, tous ceux dont des membres de la famille auraient pu la côtoyer, tout individu détenant quelle information que ce soit qui puisse faire revivre, le temps d'un documentaire, Mazie, la reine de Bowery.

Le roman de Jami Attenberg est construit, par conséquent, sous la forme d'une serie d'entretiens retranscrits, entrecoupés par les extraits du journal de Mazie qui courre de 1907 à 1939.

"Hier soir, je suis passée par Wall Street avant d'aller rendre visite à Ti. Ill fallait que je vois ça, le jour où la bourse de Wall Street s'est effondrée. Eh bien, j'ai vu! Les gens sanglotaient à tous les coins de rue. C'était presque beau, cette ville en deuil. J'ai fait comme s'ils pleuraient pour soeur Ti."
Mazie et New York avancent main dans la main, cette ville où elle avait débarqué enfant et qu'elle a fini par adopter au point de devenir l'un de ses monuments. Car Mazie, assoiffée  de liberté, de gens, de trottoirs, de la vie, choisit d'être un électron libre tout au long de son existence. 
Avide d'amour, elle est farouchement opposée à toute forme d'engagement. Jeune femme dans une société stricte, elle enchaîne les sorties, les verres, les cigarettes. Juive imperméable à toute forme de manifestation divine elle se lie d'une amitié éternelle à la soeur Ti, petit bout de femme qui arpente les rues de New York en essayant de sauver le monde et qui oeuvre auprès de Bowery Mission.

Si Joseph Mitchell, journaliste au New Yorker, lui consacre un article dans son journal en 1940, ce n'est pas pour rien: Sainte Mazie est véritablement la patronne de tous les sans-abris et laissés pour compte que New York abrite par milliers dans ses rues à cette époque.
Si Fanny Hurst, auteur et surtout mondaine chevronnée,  ne tarit pas d'éloges à son encontre, c'est aussi parce que Mazie est vraiment la reine à Lower East Side.

En lisant son histoire nous sommes plongés dans l'histoire de New York. Les témoignages multi-générationnels que Jeni Attenberg fait intervenir dans son roman donnent rythme et vie au récit qui se construit, tel un patchwork, sous nos yeux.

Arrivée à la fin, pour ma part, j'étais éperdument amoureuse de Mazie Phillips-Gordon.

"La Prohibition est finie mais New York s'en moque. Nous n'en faisons qu'à notre tête depuis si longtemps! Quand un habitué est venu annoncer la nouvelle chez Finny, des acclamations ont fusé dans l'assistance. Un type a applaudi avant de s'apercevoir qu'il était le seul à le faire.
Au comptoir, un gars s'est lamenté:Moi, j'aimais bien que se soit illégal de boire un coup! Ca mettait un peu de piment dans le quotidien."

"Mazie, sainte patronne des fauchés et des assoiffés", Jami Attenberg, Editions Escales août 2016, Traduction Karine Reignier-Guerre

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